Ronda Rousey, celle qui a fait exister le MMA féminin
- Malo
- 30 juin
- 4 min de lecture
Elle n’était pas simplement une combattante. Elle était un basculement. Une faille dans le système. Avant elle, les femmes n’avaient pas leur place à l’UFC. Après elle, elles ont eu leur propre catégorie, leur propre main event, leur propre légende. Ronda Rousey, judoka médaillée olympique devenue icône du MMA, a imposé le MMA féminin sur la carte du monde à coups de clés de bras. Mais derrière la success story aux allures de conte de fées, que reste-t-il vraiment ?Portrait d’une pionnière aussi dominante que controversée sportivement.

Ronda Jean Rousey naît à Riverside, en Californie, en 1987. Fille d’AnnMaria De Mars, judoka et championne du monde en 1984 à Vienne, elle grandit dans un environnement où la discipline est plus qu’une valeur : c’est un héritage. Son père, Ron Rousey, atteint d’une maladie incurable, se donne la mort alors qu’elle n’a que huit ans. Un drame fondateur.
Sa mère la forme dès ses 11 ans. Elle enchaîne ensuite les entraînements avec Gokor Chivichyan à l'Hayastan Academy, puis avec Jimmy Pedro, légende du judo américain. À 17 ans, elle termine neuvième aux Jeux olympiques d’Athènes en 2004, tout en décrochant le titre national.
En 2006, elle décide de monter en -70 kg : le cutting est devenu un frein. Le changement est plus que payant. Médaille d’or aux Jeux panaméricains de 2007, puis deux mois plus tard, médaille d’argent aux championnats du monde à Rio. Elle s’incline en finale face à la Française Gévrise Émane, mais marque les esprits : elle élimine une Japonaise au premier tour, domine l’Italienne Ylenia Scapin, et terrasse la championne du monde en titre, Edith Bosch, par ippon. Elle devient alors la première Américaine à monter sur un podium mondial depuis 1995.
En 2008, elle décroche le bronze aux Jeux de Pékin. Première Américaine médaillée olympique de judo. L’histoire est en marche.
Le MMA pour continuer d’écrire sa légende
Trois combats amateurs entre août 2010 et janvier 2011. Trois victoires par clé de bras. Trois soumissions avant la fin de la première minute. Elle passe professionnelle le 27 mars 2011. Et là, tout bascule. Le ton est donné : mesdames, rangez vos bras, les arm bars vont pleuvoir.
Premier combat au King of the Cage en mars 2011 : 25 secondes pour soumettre. Trois mois plus tard, Charmaine Tweet, championne IFMA et IFK, résiste… 45 secondes. Deux combats, deux clefs de bras, deux exécutions cliniques. Elle signe au Strikeforce.
Premier combat dans l’organisation ? Même scénario : Sarah D’Alelio tape au bout de 25 secondes. Deux mois plus tard, Julia Budd subit le même sort. Moins d’une minute encore. Quatre combats professionnels, quatre clés de bras r1. Quatre dominations.
En 2012, elle ralentit le rythme : deux combats, mais toujours aussi expéditifs. Face à Miesha Tate, elle dépasse enfin les 4 minutes… pour la soumettre à 30 secondes de la fin du 1er round. Et Sarah Kaufman ? 54 petites secondes seulement.
À ce stade, la logique s’impose d’elle-même : la domination est totale. La suite est inévitable.
L’UFC se plie, Rousey impose sa loi
Ce n’est pas l’UFC qui recrute Ronda. C’est Ronda qui force l’UFC à changer. Dana White avait dit : “Aucune femme ne combattra jamais dans l’octogone.” Il revient sur ses mots. Rousey ne se contente pas d’entrer dans l’organisation. Elle impose la première catégorie féminine.
Le 23 février 2013, elle devient la première femme à combattre à l’UFC, directement pour le titre, et en main event de l’UFC 157. Une affiche partagée avec Urijah Faber, Lyoto Machida, Robbie Lawler. Et c’est elle qui est en haut de l’affiche. Elle n’a même pas encore combattu dans la ligue. C’était une autre époque…
Résultat ? Aucun suspense. Fin du premier round, arm bar. Intégration réussie.
Le reste suit une logique implacable : revanche contre Miesha Tate, soumission à la fin du 3e round, une performnace notable de Tate à souligner. Puis TKO au corps sur Sara McMann. Ensuite, TKO sur Alexis Davis. Retour aux sources avec une soumission contre Cat Zingano pour 14 secondes de combat. Puis, un nouveau TKO sur Bethe Correia en 34 secondes.
Le début de la fin...
À chaque combat, la même partition. À chaque fois, une domination sans appel.
Mais l’UFC, avec ses paillettes et sa lumière, commence à toucher quelque chose de plus profond : l’ego. Rousey se croit invincible. Et pire : elle se croit striker.
Face à Sara McMann, ça passe. Alexis Davis ? Pareil. Bethe Correia ? Encore un TKO rapide. Elle croit que ça y est, elle peut dominer même debout.
Mais le 15 novembre 2015, le choc va se produire. Elle affronte Holly Holm, une kickboxeuse d’élite, tactique, technique et patiente. Elle évite les takedowns et score en striking. Et surtout, elle brise l’aura. Ronda revient dans son coin en sang et dans le doute. Elle n’a jamais connu ça, même le grappling est à l’avantage d’Holm. Le second round commence. Une combinaison en anglaise. Elle recule. High kick. KO. La planète MMA s’arrête. Ronda est tombée.
Un an plus tard, Amanda Nunes l’achève en 50 secondes. La légende s’effondre définitivement. C’est son dernier combat avant de se tourner vers la WWE.
Héritage, limites, vérité : relire Rousey à l’ère du recul
Ronda, c’est l’histoire d’une femme avec un grand F. Une combattante sans peur, prête à casser les codes, imposer sa vision, et faire plier un système pour ouvrir la voie aux autres.
Une inspiration, une légende, une pionnière.
Mais si on met le storytelling de côté et qu’on analyse sa carrière à froid, certaines limites apparaissent. Son bilan est remarquable : 12 victoires, 2 défaites. Dix victoires de suite, 7 soumissions, 3 KO/TKO, presque toutes au 1er round. Une ceinture Strikeforce, six défenses de titre à l’UFC. Mais contre qui ? Le niveau du MMA féminin était encore balbutiant. Et les deux seules adversaires de très haut niveau qu’elle affronte l’ont battu et facilement…
Un striking limité. Un fight IQ pas toujours juste. Et un ego qui, en croyant pouvoir tout faire, finit par la brûler.
Ronda Rousey a changé l’histoire. Mais son règne, aussi dominant soit-il, a été rattrapé par l’évolution du sport qu’elle a contribué à bâtir. Elle est une légende… mais aussi un symbole à questionner.


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